Là-haut sur la colline
Quand cette photo a été prise, je n'étais qu'un petit bout de fille très gâtée et aimée
par mes parents, mes frères et mes sœurs. Là, je suis avec ma sœur Alice qui me
portait en adoration. Très peu savais-je à cet âge là que des années plus tard, je
m'amuserai comme une folle sur cette colline qui était champignonnée par un camp
militaire. La colline faisait face à la maison de mes parents, la villa ‘Les Vertes
feuilles'. La grande fenêtre de la salle de couture de ma sœur Odile avait une vue
imprenable sur la colline jusqu'au moment où Monsieur Villa, un entrepreneur de
maçonnerie, acheta ce terrain pour y construire une grande, grosse maison. Puis, plus
tard, il construit aussi un petit immeuble de deux étages avec je crois, quatre
appartements, à moins que ce soit six, à louer. Enfin, la fortune de Monsieur Villa
camoufla à jamais notre vue sur cette immensité parfaite. Revenons à cette colline et
à mes copains et copines de la rue Maginot et à nos exploits. D'abord que je précise
que je ne suis plus exactement certaine qui faisait parti de l'aventure que je vais vous
raconter. Dans notre groupe d'enfants néanmoins, il y avait Jean-Jacques, René,
Roger, Josiane, Mireille et Arlette, (les jumelles), Fatiha, Nicole, Denise et Marcelle.
En une belle journée ensoleillée, et Dieu sait que nous en avions beaucoup, notre petit
groupe à l'esprit vif découvrit à l'extérieur des clôtures du camp militaire, un morceau
de carrosserie d'auto. En fait, c'était une aile bien arrondie et assez spacieuse.
Immédiatement, cette tôle délaissée devint notre toboggan et, notre colline verdoyante,
notre piste.
Trois de nous prenaient place à l'intérieur de cet engin, les autres nous donnaient le
coup de pousse nécessaire pour prendre de la vitesse. Et nous voilà, les cheveux dans
le vent, le sourire plus large que le visage, des rires et des cris de joie qui
s'entendaient parfaitement depuis la fenêtre de ma sœur Odile. Ensuite, vaillant
comme le comte d'Artagnan, nous remontions notre bien précieux et là, l'équipage
changeait. Chacun son tour et nous répétions l'exploit pendant des heures. Notre
piste était devenue lisse et si, dans notre jeune enfance, les championnats de toboggan
avaient existés, nous aurions gagné la médaille d'or, j'en suis sûre.
Seulement, au retour à la maison, j'écoutais les conversations et elles n'étaient pas des
meilleurs envers ces enfants intrépides qui risquaient de se casser le cou. Sans le
moindre doute et aveuglée par l'amour maternel, ma mère me demanda si je connaissais
ces enfants. Bien sûr, je ne savais rien de cette aventure. Tranquille, ma mère se
remit à son travail de couture. Ouf, ce qu'un petit regard innocent évita !
Suzanne Servera Ripoll